Pourquoi la guerre a-t-elle éclaté ?

L’Allemagne

Après la guerre de 1870 l’Allemagne a connu une croissance démographique et économique importante au détriment de ses voisins.

  • Elle est passée, entre 1870 et 1910, de 41 à 65 millions d’habitants.
  • Son industrie rencontre un vif succès à l’exportation pour ses produits de haute technicité (chimie, métallurgie, électricité…). Elle est alors la deuxième puissance économique mondiale.
  • Elle aspire à devenir une grande puissance navale dont le but est ouvertement d’entraver le flux commercial vital à l’Angleterre.
  • Elle a, lors du traité de Frankfort, enlevé l’Alsace et la Lorraine à la France.

Son unification encore récente, réalisée par Bismark en 1871, a laissé subsister de profondes disparités qui la place sous la menace de l’instabilité intérieure.

Von Bismark
Von Bismark
  • A l’ouest, une Allemagne moderne et libérale où l’industrialisation a entraîné l’apparition d’une contestation socialiste.
  • A l’est, une Allemagne quasi-féodale où une aristocratie militaire, les Junkers gèrent de grandes propriétés foncières et dont l’agriculture, souvent archaïque, manque de productivité.
  • Les deux tiers de la haute administration civile, de l’état-major et des sièges au Reichstag sont aux mains de ces mêmes Junkers qui bloquent toute évolution démocratique.

    Les Junkers
    Les Junkers

Elle pousse aussi l’Autriche-Hongrie, son alliée, à agir hors de ses frontières, renforçant ainsi sa rivalité potentielle avec la Russie tsariste.

autriche-hongrie

  • Le Kaiser Guillaume II monté sur le trône à 29 ans en 1888, est un personnage velléitaire et influençable qui cultive une image virile, guerrière et aventurière de lui-même. Ses ambitions coloniales, nourries par une jalousie inexpiable contre son cousin le roi d’Angleterre Georges V répondent largement aux attentes des pangermanistes, soucieux d’assurer à l’industrie allemandes, matières premières et débouchés.

    Guillaume 2
    Guillaume 2
  • La Ligue Pangermaniste, fondée en 1891, souhaite unir tous les pays germanophones dans une grande communauté de race et élargir son influence vers l’Empire ottoman, voire à l’Afrique.

    Georges V
    Georges V

La France

A partir de 1871, la France vit, à l’égard de l’Allemagne, dans une atmosphère de rancune tenace.

  • La perte de l’Alsace et de la Lorraine, glacis stratégiques et avant-postes de la République face au monde germanique, a profondément ébranlé la conscience française.
  • « Et la Revanche doit venir, lente peut-être,
    mais en tout cas fatale, et terrible à coup sûr;
    la haine est déjà née et la force va naître;
    c’est au faucheur à voir si le champ n’est pas mûr. »
     Extrait des Chants du soldat de Paul Déroulède(homme politique et écrivain, engagé volontaire lors de la guerre de 1870).

    Paul Deroulede
    Paul Deroulede
  • Elle a également dû payer à l’Allemagne une somme de 5 milliards de francs or (environ 27 milliards 441 millions d’euros) comme dommages de guerre. Pour récolter cette somme, la République a dû lancer deux emprunts publics.
  • Sa population compte alors 40 millions d’habitants, soit 25 millions de moins que l’Allemagne, et celle-ci vieillit plus rapidement.

La société traverse de profondes turbulences.

  • Politiques : entre conservateurs et libéraux au sujet des responsabilités du désastre de 1870.
  • Entre cléricaux et partisans de la laïcité.
  • La situation sociale est tendue, des grèves ouvrières sont réprimées dans le sang.

La seule valeur commune à la majorité des Français (extrême-gauche exclue) est le patriotisme.

L’Angleterre

Le début du 20ème siècle marque un tournant dans l’attitude isolationniste de l’Angleterre.

  • Durant le 19ème siècle l’Angleterre s’était consacrée à l’essor de son économie et de son empire.
  • Début du 20ème siècle, l’équilibre des forces en Europe devient son souci majeur. L’émergence d’un état trop puissant capable de s’imposer aux peuples d’Europe centrale et occidentale, d’occuper les ports de la Manche, constitue une menace directe pour sa survie.

Elle doit se trouver des alliés continentaux.

L’Autriche-Hongrie

L’empire des Habsbourg compte alors 52 millions d’habitants. François-Joseph empereur d’Autriche et roi de Hongrie, assure le pouvoir de ces deux peuples sur une multitude d’autres qui réclament une plus large autonomie, voire l’indépendance.
Si certains milieux viennois inclinent à plus de libéralisme envers ces minorités

  • des Slaves du nord (Polonais, Tchèques, Slovaques, Ruthènes, Slovènes)
  • des Slaves du sud (Serbes, Croates).
  • des Latins (Roumains, Italiens)

Il en va tout du contraire de la part des Hongrois.

L’Autriche-Hongrie vise la possession d’un port sur la Mer Egée

La Russie

L’empire du tsar Nicolas II est le plus peuplé d’Europe (159 millions d’habitants). Son industrialisation n’a été possible que par un recours massif aux investisseurs étrangers.

  • L’économie russe est dans un état de dépendance semi-coloniale.
  • La population ne bénéficie pas des retombées de la croissance. La paysannerie (80%) et le prolétariat végètent dans l’alcoolisme et l’analphabétisme.
  • L’empire compte aussi des minorités ethniques remuantes : Finlandais, Polonais, Baltes, peuples du Caucase …
  • En quête d’un débouché sur les « mers chaudes », la Russie rêve de contrôler les Dardanelles et caresse aussi l’espoir d’arriver un jour à l’Adriatique en traversant les Balkans du Nord-Est au Sud-Ouest

Nicolas II va tenter de redorer son blason par des succès de politique étrangère dans les Balkans, mais il se heurte aux visées austro-hongroises.

Les états balkaniques

Zone de contact entre monde germanique et monde slave, ils sont le coeur de l’affrontement millénaire entre catholicisme et orthodoxie à quoi l’invasion ottomane des 14ème et 15ème siècles est venu surimposer l’Islam.
Certains états nationalistes, victimes des intérêts antagonistes de l’Autriche-Hongrie et de la Russie, menacent la définition multiethnique de l’Empire austro-hongrois.

  • La Russie exploite le thème de la solidarité slave et orthodoxe pour séduire la Serbie.
  • Fiers de leur émancipation de la tutelle turque, les Serbes se voient fédérateurs de tous les Slaves du Sud.
  • Contre la Serbie, l’Autriche-Hongrie brandit l’étendard du catholicisme et se concilie la Bulgarie.
  • A l’encontre de la population bosniaque qui voudrait être rattachée à la Serbie, l’Autriche-Hongrie applique la manière forte et annexe officiellement la Bosnie en 1908.balkans

En bref

  • Allemagne : ne rêve que de succès extérieurs.
  • France : rancune à l’égard de l’Allemagne.
  • Angleterre : crainte pour sa survie économique.
  • Autriche-Hongrie : empire ébranlé par les revendications nationalistes.
  • Russie : souhaite un accès à la Méditerranée et soutient certains états balkaniques contre d’autres.
  • Les états balkaniques : victimes des intérêts antagonistes de l’Autriche-Hongrie et de la Russie.